• Chapitre II: Partie 3

     

     Si vous n'avez pas lu le début de cette fiction (l'Héritier des Dieux), ne lisez pas cet article. Le début de la fiction est ici.

       Maintenant il y était, au sommet de la tour. Il voyait tout ce qu’ils avaient fait. Par « Ils » il parlait de ses ennemis comme des siens. Il n’y a pas de guerre si les deux camps ne s’opposent pas. Et il n’y a pas de tel carnage sans guerre. Quelques-uns luttaient toujours, les derniers survivants. Ils tenaient coûte que coûte le plateau le plus haut. Le chef de la Résitance soupire tristement. S’il n'avait pas choisi le chemin de la rébellion, ses amis respireraient encore. Mais maintenant, les corps de Shake et Tahran gisaient inertes sur le sol. Comme celui d’Erick et tant d’autres. Il n’avait plus le choix. En plus après avoir écrasé le restant de ses hommes, ses ennemis s'attaqueraient à Delia, son fils et puis son père. Avait-il bien fait ? Il n’en savait rien. Il regarda le sol une cinquantaine de mètres en contrebas. Il le regardait avec une envie qu’il n’essayait même plus de se cacher. Si seulement il pouvait s'abandonner à la mort. Un pas et il n’aurait plus tous ces regrets et ces responsabilités. Rien qu'un. Mais il ne pouvait pas.

     

       Nanor se morfondait pour toutes ces morts. Mais que pouvait-il faire ? Pion d'un grand jeu, celui de l'Histoire, il était impuissant tout simplement. Que diraient les chansons sur lui ? L'histoire d'un rustre, d'un fanatique ou celle d'un homme qui a fait face à l’oppression ? Tout compte fait, peu lui importait ce que les barde chanteront. Il voulait seulement que son combat ne soit pas vain, qu'il ne tombe pas dans l'oubli ou que sa cause devienne celle d'un ignorant. Certes il n'était pas homme de lettres, mais il savait que ce que faisaient ses ennemis était mal. Plutôt mourir libre qu'opprimé. 

       De son bras indemne il commença à armer la baliste face de lui. Le point fort de leur défense. Quelle ironie. A quoi avait-il servi au final ? Elle tirait des pieux larges d'environ un pied et demi. Ils étaient doublés de magie, pour partir plus vite que la mécanique le permettait déjà et au choc libérer toute l’énergie que le projectile retenait en une explosion. Il restait deux pieux. Cela les ralentirait peut-être mais ne les stopperait pas. Il n'avait rien promis après tout, il n'avait pas promis de les aider. Mais sa morale l’empêchait de chercher la mort ou de la fuir. Il devait juste trouver une échappatoire qui obéissait à sa morale. Et il l'avait trouvé : se battre. Sa main était fermement agrippée sur le levier presque tremblante. D'un mouvement de bras il signerait son arrêt de mort et celui d'une centaine d'autres. Si les dieux existaient, qu'ils puissent un jour le pardonner. Il tira le levier.

       Le projectile frappa de plein fouet la falaise. Un pan s'écroula et avec lui une centaine d'hommes. Il entendait leurs cris. Il entendit le fracas des corps. Il entendit chaque douleur et chaque surprise. Il aurait pu s'en vouloir mais l’adrénaline bloquait chacun de ses sentiments emphatiques. Un rugissement retentit, il emplissait l'air, résonnait contre les murs. Un rugissement de colère et de haine. Un rugissement d'un être à la puissance incommensurable, celui d'un dragon. La créature obscurcissait le ciel de ses ailes. Elle avait au moins la taille d’un navire de guerre. Machine implacable dont le seul but était la souffrance d'autrui. D'une main tremblante il activa le levier une dernière fois, le projectile fusa à nouveau dans un crépitement qui se rependit dans l’air. Le pieux allait droit contre le poitrail de la bête. Cette fois elle ne poussera pas un cri de haine mais un cri de souffrance, elle poussera un long râle avant de tomber inerte. Elle ne bougera plus, elle sera au sol. Cadavre titanesque. La Résistance allait gagner. L’Être Obscur allait mourir, les oppresseurs allaient fuir.

     

       Nanor lâcha un sourire triste et affronta la réalité de ses yeux. Le pieux glissa sur les écailles de son ventre pourtant plus fines que celle de son dos. Le Dragon Volcanique plongea vers le Chef de la Résistance en redoublant son rugissement de colère. Avant d'atteindre le rebord de la tour, le dragon prit forme humaine et roula sur l’épaule avant de se redresser devant Nanor, un rictus aux lèvres. Il le regarda ainsi une bonne minute, un sourire sardonique lui tordant les lèvres alors qu’il tournait autour de lui comme un loup autour de sa proie. Une longue minute où Nanor resta impassible le fixant lui aussi, comme on fait face à la mort.

    - Tu devrais être honoré que je tue.

       Les mots résonnèrent dans l’air un peu lointain. L’Être Obscur leva sa hache. Tout semblait se passer si lentement. Les gravures qui ornaient le manche de la hache se reflétèrent sur l’argent du clair de lune. Nanor les contempla un peu hébété. Il ne fit rien, ne bougea pas. La hache trancha l’air, puis la chair et l’os. Un bruit sourd accompagna la chute de la tête au sol. Puis ce fut au tour de son corps de tomber. Ses genoux d’abord puis le reste du sol se laissa glisser au sol. Son sang s’écoula comme suivant un chemin. Celui de la pierre ouvragée. Sa tête roula lentement jusqu'à son flanc. Il avait le regard vide, il semblait presque apaisé. Il était mort, c'était tout.

     

    *

     

                  Rapport de la bataille de Dem'Breck

      De Kalhen, général des armées d' Insiin, Roi de la principauté du Nord ;

     

                Je peux vous affirmer avec certitude que le problème des traîtres a été résolu à Dem'Breck et par ailleurs dans toute la région Taukre. La totalité des troupes adverses a été éliminée, l'ordre Purification a été exécuté avec succès.

                Aucune femme et enfant n'ont été aperçus à Dem'breck. J'en déduis qu'ils ont fuis avant la bataille et qu'ils se terrent dans les campagnes environantes. Mais ils ne se soulèveront pas avant une dizaine d'années, étant donné le massacre effectué sous votre initiative. Je pense que nous n'aurons aucun problème dans cette région avant longtemps.

                De plus, j'ajoute qu'à la nouvelle de la défaite de la Résistance à Dem'Breck les autres bastions de la Résistance se désagrègent ou rendent les armes. Je crois qu'on peut dire que le problème Résistance est résolu dans tout Boclam. Je propose tout de même de laisser le désert du Nord et les terres glaciaires de l'Est à leurs occupants ignorants. Cela réduira notre tâche de conquête.

                 Nanor, chef de la Résistance, été décapité. Dolcrine, Héritier de l'Ombre, l'a humilié de sorte à donner l’exemple. La dépouille du chef de la Résistance a été accrochée à un poteau à l'entrée de la cité de Dem'Breck, encore vêtu de son armure et de ses armes. Un écriteau lui enserrant la poitrine indique qui il était et la nécessité de sa mort. Je pense qu'aucun voleur ne s'aventurera dorénavant sur ses lieux, à chaque pas on entend le craquement des os et le sang a rendu le sol aride. 

                Bilan des morts : Nous n'avons pas encore fini de compter les cadavres mais voici le bilan provisoire.

     Résistance : 2750 morts, 0 survivant.
     Armée d'Insiin, Roi de la principauté du Nord : 1100 morts, 14350 survivants.
     Armée de Fork, Roi de la principauté de l'Est : 1850 morts, 7500 survivants.
     Armée d'Erne, Roi de la principauté de l'Ouest : 1450 morts, 16230 survivants. 

                J'ai fini mon rapport. J'attends vos ordres pour commencer la conquête des terres du Sud.

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  • Commentaires

    1
    Mardi 5 Septembre 2017 à 18:41

    Je sens que la suite sera avec le fils...

    2
    Mercredi 6 Septembre 2017 à 20:48

    Exact. J’avoue que c’est plutôt prévisible. Par contre je pense que la mort de Nanor ne l’est pas, du moins je l’espère.

    Je trouvais le fait de commencer par un personnage qui est destiné à mourir était plus intéressant. Souvent en heroic fantasy on peut trouver un héros dont le père est mort au combat mais je n’ai pas le souvenir qu’on suivait une partie de la vie de ce même père (à part dans un livre différent basé sur la vie du père, ça arrive). De plus cela introduit l’univers et permet de voir comment le monde évolue durant une certaine période.

     

    C’est cette même idée d’évolution qui m’intéresse. En heroic fantasy je n’ai jamais un monde qui évolueer jusqu’à quitter cette période médiévale. J’ai déjà vaguement évoquer cette idée d’évolution dans une présentation de mon univers. En fait mon monde évoluera petit à petit, jusqu’à la découverte des continents, une renaissance dirigée par une aristocratie décadente, puis une ère steampunk (le steampunk est une période défini comme le futur vu par les gens de l’ère victorienne, c’est un peu compliqué à expliquer, en résumé cela ressemble énormément à l’ère industrielle avec des machines plus développés marchant seulement à la vapeur), durant cette période une surconsommation fera détruire une grande partie de la Terre pour sombrer dans une ère post-apocalyptique. Celle-ci durera plusieurs siècles. Seulement quelques foyers de civilisation n’avaient pas été détruit, ces foyers évolueront isolés. Après avoir atteint un niveau de technologie impressionnant ils iront recoloniser les terres dévastées et rendront ces terres à nouveau fertiles. S’en suit enfin une ère de science-fiction.

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